Montagne sacrée où, il y a longtemps, une jeune fille nommée Tembaïn serait morte, Tembaïn était le point mitoyen de notre méharée. Après avoir traversé un vaste plateau gris et caillouteux entouré de dunes et ponctué de petits wadis (vallées où, quand il pleut, l’eau s’écoule le temps de quelques heures), nous voilà aux abords du mont qui, du haut de ses 200 et quelques mètres, s’élève dans le désert comme un petit Ayer’s Rock saharien. Guidés par le toujours agile Khalifa, nous entreprenons son escalade par un sentier abrupt. La pierre a des allures de corail coupant, si bien qu’y mettre la main est une expérience plutôt douloureuse qu’on fait rapidement. À chaque pas, le sable s’échappe sous nos pieds, et moi qui suis la dernière de la queue, je crains parfois qu’un éboulis se produise. Pause à mi-chemin pour contempler le paysage. L’immensité, une fois de plus, mais de haut cette fois. On ne s’y fait pas. La beauté ne lasse pas. On reprend la montée. Khalifa me donne la main lorsque les points d’appui manquent. Lui, il grimpe comme s’il marchait dans la plaine. Nous voilà sur Tembaïn. Sommet rêche couvert de pierres lunaires, de petits cairns montés par les voyageurs de passage et de touffes rabougries de végétation, parmi laquelle se trouve la shieh, thé saharien. Pendant que nous contemplons le panorama, Khalifa empli le rebord de sa veste de cette plante odoriférante que nous boirons plus tard avec le thé. Après une escale de 30 minutes, nous redescendons par l’autre versant en empruntant un sentier bien marqué. Alors que nous sommes presque rendus, le grondement aigu d’un groupe de motocross se fait entendre. Ils arrivent bientôt en trombe devant Tembaïn (et devant nous), s’arrêtent, prennent quelques photos et, au bout de 3 minutes, redémarrent leurs engins et disparaissent vite fait à l’horizon. « Ces gens-là vont retourner chez eux, montrer ces photos à leurs amis et dire : « je suis allé à Tembaïn » », nous dit alors Khalifa. « Mais ils n’ont rien compris, et, surtout, ils n’ont rien vu », ajoute-t-il.

Commentaires