Chronique I
Nous prenons donc la route en 4X4 vers notre point de départ, à savoir une zone de plateau et de petites dunes située à environ 2 heures 30 de route au sud de Douz, près du parc national du Sahara (un parc relativement nouveau et apparemment dépourvu d’animaux; les Tunisiens ne semblent pas comprendre l’utilité du projet, ni nous d’ailleurs, si ce n’est rallonger le trajet pédestre des chameliers et des voyageurs qui n’ont pas le droit d’y entrer). Là, nous sommes attendus par les deux chameliers qui nous accompagneront, Medani et Edy, ainsi que par les trois dromadaires du premier et les deux du second. Originaires du village oasien d’es-Sabria, les deux hommes sont chameliers de métiers et vraisemblablement très amis. Si le premier est plutôt extroverti et a le refrain plus que facile (ce qui m’a vraiment ravie!), le second a de petits yeux noirs timides et ricaneurs et les trois doigts partiellement amputés de sa main droite révèlent la dureté de son métier. Tous deux pères de six enfants, Medani et Edy ont sans contredit été, avec Khalifa, les responsables incontestés du succès de notre voyage, et leur rencontre ce que nous avons préféré. Leur hospitalité sincère, leur gentillesse, leur sens de l’humour, leur amour visible du désert, et leur respect de sa faune et de sa flore nous ont profondément marqués, et il m’est encore difficile d’expliquer exactement comment. Je sais seulement que, comme lors de la rencontre de nos amis Maliens, nous avons eu accès à une autre façon d’entrevoir la vie au quotidien et notre rapport au monde qui nous entoure, et cela de l’intérieur. Le fait que nous étions seuls a sans contredit aidé à l’affaire, tout comme nos quelques mots d’arabe, qui se sont démultipliés au cours de la semaine et de nos 100 kilomètres de marche grâce à mon lexique tout chiffonné de mots berbères tunisiens très utiles. Voici quelques exemples, ça pourrait vous servir un jour :.) :
- Dougi : cloue ou enfonce; c’était l’ordre de Medani quand je devais enfoncer les pieux de la tente berbère. J’ai déduit la traduction
- Rani : chante; là, y'a pas de doute. Mais à part avoir réussi à nous faire chanter « aani cououni chaaoani » (idée brillante de Vincent), l’ordre n’a pas donné de résultat
- Gamera : la pleine lune
- Leïla : quartier de lune (Comme dans la chanson : Leïla elle l’aaa toutou, toutoutoulou, toutoulou... ah non, c’est pas ça)
- Chai bil halib : Thé avec du lait (en Égypte, c’est chai bil leben... pouvez-vous me donner une chance?)
- Filfil : piment (c’est mignon donc facile à retenir... de toute façon, piquants comme ils sont, vous pouvez vous en passer)
- Jamal : chameau : facile; donc Jamel Debouze = Chameau Debouze; En Égypte, c’est Gamal, donc Gamal Nasser = Chameau Nasser. Sympa!
- Saga : froid; ben oui, y’a fait frette dans’l’desert toé chose!
- Afiyah : feu; très efficace quand c’est « saga » le soir. Dans le désert, on allume le feu avec le bois sec ramassé près du lieu de campement. Car il y a bel et bien des arbustes et même des arbres dans le désert, et avec la sécheresse des dernières années, il y en a pas mal de tout séchés. Inutile donc de préciser que le feu pogne vite, et que comme tout le sol est en sable, on n’a pas besoin de mettre des cailloux autour.
- Drr : enfant; Khalifa disait Drrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrrr! J’ai jamais vu un champion du roulement de r pareil!
- Rambla : la dune. Pas la petite dunette derrière laquelle on nous voit quand on tente de se cacher pour faire pipi. Non. La grande dune, la vraie, de plusieurs dizaines de mètres de haut. Pas la Rambla de Barcelone donc.
- El-tem : la plante que mangent les dromadaires; car ils ne mangent pas toutes les plantes. Mais le el-tem, oui. Tenez-le vous pour dit.
- Ktir : beaucoup
- Tir : oiseau
- Sarhir : petit
Donc sarhir ktir = petit oiseau; c’est cute, hein?
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